|
|
1904 - 1979
|
Charles
Fauvel est surtout connu dans le milieu aéronautique en tant que concepteur
de planeurs de formule "aile volante". Pourtant, sa vie fut
également riche de nombreux autres événements qui ont marqué l'histoire
du vol à voile français, et que nous allons évoquer tout au long de cette
biographie.
Né le 31 décembre 1904
à Angers, Charles Fauvel a été attiré dès
son plus jeune âge par l'aviation. Dès 1913, il
construit des modèles réduits, et le meeting
d'acrobatie de Garros et Audemar à Angers en
1914 scèle définitivement sa passion pour
l'aviation. Il passe son baccalauréat
latin-sciences-philosophie puis devient boursier
militaire de pilotage en 1923; il entre ensuite
à l'Ecole de l'Air. En 1925, il assiste au
premier concours de Vol à Voile de Vauville, au
cours duquel Alfred Auger battit officieusement
le record d'altitude sur le planeur Peyret-Abrial
"Vautour" avec plus de 700 mètres.
Cette même année, pendant son service militaire
à Chateauroux, il fait la connaissance de Pierre
Massenet, avec qui il va participer à la
création du Club Aéronautique Universitaire
(CAU), un des clubs de vol à voile les plus
renommés d'avant 1940. |
|
|
C'est également en 1928
que Fauvel, assistant au nouveau concours de vol
à voile estival de Vauville, a l'idée de ses
premières études d'ailes volantes. Observant
certains planeurs dotés d'ailes longues et fines
(Peyret-Abrial "Rapace", Wolf
Hirth...), il songe que pour diminuer au maximum
les effets des trainées parasites, on ne peut
pas augmenter indéfiniment l'allongement des
ailes. La réduction de la taille du fuselage et
des interactions avec l'empennage horizontal
aboutit effectivement à la formule "aile
volante", pour laquelle Fauvel va déposer
un brevet en 1929. Contrairement aux projets
conçus à cette même époque en Allemagne par
les frères Horten et par Lippish, les travaux de
Charles Fauvel, basés sur certaines études et
expérimentations de Georges Abrial et de René
Arnoux, portent sur l'utilisation d'une voilure
dotée d'un profil "autostable",
assurant à la foi portance et stabilité, sans
recourir à une aile en flèche et vrillée comme
sur les planeurs allemands (voir la rubrique
"Un peu de technique..."). |
|
Horten Ho-2
|
|
|
Toujours en 1928, Charles Fauvel procède
à la fin de l'année à la mise au point d'un petit monoplace léger,
le Peyret-Mauboussin PM-10, muni d'un moteur Scorpion ABC de 34
cv, dont la finesse maximale avoisine les 16, sans capot-moteur
profilé ni carénage de roues. C'est avec cet appareil qu'il va battre
en septembre 1929 plusieurs records internationaux dans la catégorie
des moins de 400 kg, dont le record international d'altitude (5193
mètres) et le record de durée (12 heures). En 1929, Fauvel participe
à la création de l'AVIA avec Massenet, Auger et quelques amis, qui
est un comité fondé pour la promotion et le développement du vol
à voile. Il quitte alors l'armée pour entrer à l'AVIA comme directeur
sportif, tout en étant chef-pilote du CAU. C'est lui qui prospecte
et découvre les terrains de Beynes (proche de Paris) et de la Banne
d'Ordanche (en Auvergne). Dans le même temps, il réceptionne et
met au point le monoplace AVIA 10 A dessiné par Jarlaud aux établissements
Béchereau. En 1931, il doit quitter l'AVIA en proie à des difficultés
financières, et réintègre l'Armée de l'Air comme pilote d'essais
au Centre d'Essais en Vol de Villacoublay, jusqu'en 1933. Lors de
ses permissions, il participe au concours de Vauville en 1931 sur
AVIA 32 E, et réalise la meilleure distance française du concours.
En 1932, il passe son brevet C (n° 19) à la Banne d'Ordanche, sur
AVIA 15 A. |
|
|
Il se lance alors dans
l'étude de son premier appareil, l'AV-1, suivi de l'AV-2 puis du premier planeur
pur, l'AV-3 apparu en 1933. En 1935, il fait
voler l'AV-10, un biplace léger de tourisme à
moteur Pobjoy. Concentrant ses efforts sur cet
appareil, Fauvel améliore ses performances et en
en 1937, l'AV-10 emporte un record mondial
d'altitude dans sa catégorie, tout en devenant
la première aile volante titulaire d'un
Certificat de Navigabilité. Parallèlement,
Charles Fauvel poursuit ses études d'ailes
volantes destinées au vol à voile, mais la
réalisation de ses projets de planeurs va être
différée par l'éclatement de la seconde guerre
mondiale. |
|
|
En 1940, l'Allemagne
envahit la France. Charles Fauvel est muté au
Maroc comme commandant de groupe adjoint. Revenu
en France après l'armistice, il passe en 1941
son brevet de moniteur au centre de la Montagne
Noire, puis il est nommé chef du centre
militaire de vol à voile d'Avignon. Après
l'invasion de la zone libre, il prend sa retraite
de l'Armée de l'Air avec le grade de
lieutenant-colonel. En mai 1945, il travaille à
l'Etablissement d'Etudes Techniques des Sports
Aériens, à Castelnaudary. Parallèlement, en
collaboration avec la Société Aéronautique du
Rhône, il développe le modèle AV-17 à partir de l'AV-3.
Détruit lors des premiers essais, ce prototype
n'aura pas de suites. Il faudra attendre 1951
pour voir la construction de ce qui fut le plus
grand succès technique et commercial de Charles
Fauvel, l'AV-36. Ce planeur vola dans 16
pays. Une cinquantaine furent construits sous
forme de "kit" en France (les
éléments étaient fournis par la société
Wassmer, l'assemblage étant à la charge des
aéroclubs), et environ le double fut réalisé
à partir de plans par des constructeurs
amateurs. Il fut ensuite remplacé par un modèle
amélioré, l'AV-361. |
|
AV-36
|
|
|
En 1954, Charles Fauvel
crée son entreprise personnelle, la société SURVOL
à Cannes, destinée à promouvoir et à
faciliter la commercialisation de ses ailes
volantes. En 1956, c'est au tour du biplace AV-22 de voir le jour ; cette
machine sera réalisée en six exemplaires. Elle
est souvent considérée comme le chef-d'oeuvre
de Charles Fauvel, et marque la consécration de
ses études de planeur aile volante biplace.
En 1958, il crée la Coupe Survol, destinée à
récompenser les meilleures performances des
AV-36, puis plus tard des AV-22.
En mai 1960, Fauvel effectue le premier vol du
RF-1 de René Fournier, un
"avion-planeur" dont les descendants
(RF-3, RF-5, RF-10...) voleront dans de nombreux
pays. Intéressé par le concept du motoplaneur,
permettant de s'affranchir des contraintes du
remorquage et du treuillage, il sort en 1960 l'AV-45, qui est dotée d'un
moteur Nelson de 37 cv, et qui sera par la suite
améliorée sous la dénomination AV-451. Ces modèles ne
rencontreront guère de succès, pas plus que l'AV-221 qui est présenté
officiellement au 18 ème rassemblement des
constructeurs amateurs à Montluçon, en 1965.
Extrapolée de l'AV-22, l'AV-221 est un biplace
côte à côte qui dispose d'un moteur Rectimo de
39 cv. Malgré ses qualités, cette aile volante,
déclinée en une version AV-222 pour la construction
amateur, ne parvient pas à percer sur le
marché. La mode est, à cette époque, aux
machines de performance, et la formule du
motoplaneur -même de configuration classique -
n'a pas bonne presse en France. |
|
AV-22
|
|
|
En 1971, Charles Fauvel
décide d'arrêter la production commerciale de
ses planeurs, mais continue à diffuser les
liasses de plans aux constructeurs amateurs. La
société Survol propose l'AV-361, l'AV-451 ainsi
que des plans d'avions de tourisme, tels que l'AV-60. A partir de 1972, il
devient président du centre de vol à voile de
Fayence, et participe également aux congrès de
l'OSTIV (Organisation Scientifique et Technique
Internationale du Vol à Voile), notamment en
1978 à Chateauroux, où il présente un rapport
sur la formule aile volante. Il décède le 10
septembre 1979 aux commandes de son avion, un
Super Cab, qui percute les Alpes à 735 mètres
d'altitude au nord de Gênes, en Italie. Titulaire de la Croix de
Guerre 40-45, Officier de la Légion d'Honneur,
Médaille Outre-mer 1926-1927, Médaille de
l'Aéronautique, Grande Médaille d'argent de
l'Aéro-club de France, et Grande Médaille d'or
de la FFVV, Charles Fauvel a piloté plus de 200
types d'avions et 50 de planeurs. Les faibles
moyens dont il disposait, tant sur le plan
technique que financier, ne lui ont pas permis de
faire progresser ses idées autant qu'il l'aurait
souhaité. Les préjugés et les effets de mode
ont joué contre lui, mais il reste
indubitablement l'un des ingénieurs-pilotes
français les plus prolifiques et les plus
inventifs. Certaines réalisations récentes,
comme le Genesis américain, tendent à
prouver que la puissance de calcul actuelle
permet de réaliser des planeurs à haute
performance dotés de voilures autostables.
D'autre part, le regain d'intérêt actuel pour
le motoplaneur léger montre là encore que
Charles Fauvel était un précurseur et que son
oeuvre ne doit pas sombrer dans l'oubli.
|
|